Dysturb 70 photos pour les 70 ans de l’ONU : Making of

                Jeudi 22 octobre, 22 heures. Huit motos et scooters quittent un immeuble vers la place de la République à Paris. Sur chaque engin, deux photojournalistes. Ils portent des seaux plein de colle, des balais, des brosses et d’énormes sacs. Pour la seconde nuit consécutive, #Dysturb va coller dans les rues d’immenses affiches, 4 mètres sur 3, des photos de professionnels, en noir et blanc qui montrent les crises qui secouent le monde.

Ils vont sillonner les rues de Paris jusqu’à 2 ou 3 heures du matin. Ils se sont répartis les arrondissements et ont noté les emplacements possibles, ils en trouveront d’autres au fur et à mesure.

Images de migrants, de réfugiés, de victimes de la pauvreté ou d’atteinte aux droits de l’homme, des changements climatiques, images d’Afrique, d’Amérique du Sud, du Moyen Orient ou de l’Asie. Des crises à la Une des médias ou des crises oubliées. L’objectif : montrer le monde tel qu’il est, et la réponse que les Nations Unies et ses agences apportent aux centaines de milliers de personnes en besoin d’assistance : Une opération spéciale pour célébrer le 70ème anniversaire des Nations Unies en 70 photos.

Le mur doit être suffisamment lisse, bien exposé à la vue des passants, ne pas être un local commercial, un monument historique ou un édifice religieux par exemple. #Dysturb ne colle pas non plus sur le travail d’autres artistes du Street Art. La règle : respecter les autres pour assurer que les affiches restent le plus longtemps possible en bon état.

Une fois l’emplacement choisi, tout va très vite. Un premier membre de l’équipe commence à encoller le mur, le second déplie la première des quatre laies, 3 mètres de hauteur, la positionne et la déroule, puis un troisième maroufle. Ainsi de suite, avec rapidité et précision. La quatrième prend des photos de l’opération. Parfois il faut grimper sur un scooter, les mains pleines de colle, souvent sous une pluie fine.

Tous bénévoles, les photojournalistes vont ainsi passer trois à quatre heures, dans le froid de l’automne, pour poser le plus de photos possible, entre 7 et 8 par équipes et par nuit. En deux nuits, près de 50 ont déjà été affichées. 

Des passants souvent s’arrêtent, prennent des photos et posent des questions. L’accueil est enthousiaste. Aucun moment, les équipes n’ont rencontré de réactions hostiles. « C’est magnifique ! Ce weekend end, on fera une ballade pour en voir le plus possible », s’exclame un jeune homme qui sort d’un restaurant avec sa fiancée. L’un des serveurs sort à son tour. « Vous aviez déjà collé ici une fois, il y a plusieurs mois, on est heureux d’en avoir une autre, c’est très beau », dit-il. Toutes les photos sont localisées au fur et à mesure et une carte interactive est mise à jour par un des membres de #Dysturb, qui réside… aux Etats Unis.

« Dysturb ! Mais je vous connais, je vous suis sur Instagram ! J’adore ce que vous faites », lance une adolescente qui rentre chez elle avec sa maman non loin de la place de la Bastille.  Toutes deux restent un long moment à regarder une photo du Programme alimentaire mondial qui montre une distribution de vivre au Pakistan, après un tremblement de terre.

Dans la nuit de vendredi à samedi, les équipes repartiront pour une troisième et dernière nuit de collage. Ces hommes et ces femmes, qui dans la journée ont leur travail respectif, ne comptent pas leurs heures pour que ce projet, le plus important jamais organisé par #Dysturb, puisse réussir. Une fois rentrés, ils twittent, échangent leur photos, postent sur Instagram ou Facebook. Le lendemain, plusieurs retourneront sur le terrain pour prendre des photos de jours des collages de la veille. Parfois ils trouvent une photo arrachée, ou abîmée mais en règle générale elles sont là, visibles par le plus grand nombre pour « perturber » et informer.