Birgit Van Hout

Birgit Van Hout

 

Birgit Van Hout vit une véritable lune de miel depuis qu’elle a pris ses fonctions en tant que Représentante pour l’Europe auprès du bureau du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. Active depuis près de 20 ans sur la scène internationale, les droits humains sont pour elle « une vision de la vie, voire un mode de vie, une passion, un défi et en même temps une opportunité incroyable. »

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Le désir d’un monde meilleur et plus juste est apparu tôt chez Birgit. Elle a tout d’abord suivi des études de droit à la KU Leuven et s’est ensuite spécialisée dans les droits de l’homme : « les droits humains ne sont pas seulement des obligations légales, mais également un impératif moral. Pour moi, c’est une philosophie de vie, je ne considère pas les droits humains comme une carrière mais comme une vision de la vie. Au final, c’est avant tout une conviction renforcée par une passion. »

Après l’obtention de son diplôme et malgré ses qualifications, Birgit n’a pas immédiatement trouvé un emploi dans le domaine des droits de l’homme. Elle a donc travaillé six mois en tant que guide de voyage au sud-ouest des États-Unis avant de recevoir l’appel très attendu du Commissariat général aux réfugiés et aux apatrides. Pendant plusieurs années elle a interviewé et aidé des demandeurs d’asile. Une lourde responsabilité pour celle qui décidait d’accorder ou de refuser un permis de séjour dans le cadre de la Convention de Genève. Interpelée par les récits des réfugiés, Birgit décide de se concentrer sur le travail de prévention.

Sa première expérience sur le terrain a lieu en Bosnie pour l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), où elle a aidé à organiser les premières élections après la guerre. Plus tard, Birgit s’est rendue au Guatemala pour le compte de l’ONU en tant que Chargé d’affaires civiles au sein de l’opération de maintien de la paix MINUGUA. Les circonstances furent difficiles. Après un conflit sanglant dans le pays, Birgit devait relancer la société civile locale, constituée principalement de groupes d’autochtones et de femmes, dans la province isolée de Huehuetenango, contribuant ainsi à la reconstruction du pays.

Par la suite, elle est passée au Département des affaires politiques de l’ONU, où en tant que membre de la Mission des Nations Unies au Timor oriental UNAMET, elle a contribué à l’organisation du référendum sur l’indépendance de Timor-Oriental, une région envahie avec violence par l’Indonésie en 1975. La population était largement analphabète. « Nous sommes allés d’un village à l’autre dans les montagnes pour expliquer l’importance du référendum et pour montrer comment dessiner une croix sur un morceau de papier », explique Birgit. Ces efforts ont payé, la population s’est rendue en grand nombre aux urnes. Lorsque les gens se sont prononcés massivement pour l’indépendance, des groupes paramilitaires soutenus par l’Indonésie ont réagi avec violence. La maison où vivait Birgit a été brûlée et elle a dû être évacuée par hélicoptère.

Ce sont ses expériences sur le terrain qui apportent à Birgit le plus de satisfaction car « elles me procurent un profond sentiment d’utilité. Après 25 années d’oppression, la population était très reconnaissante. »

« L’un des principaux défis d’une carrière à l’ONU est qu’il est souvent nécessaire de faire des sacrifices sur le plan personnel, en particulier en tant que femme »

Afin de concilier son travail avec sa vie de famille, Birgit a décidé de quitter le terrain. Elle a commencé à travailler au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme (HCDH) à Genève. « L’un des principaux défis d’une carrière à l’ONU est qu’il est nécessaire de faire des sacrifices sur le plan personnel, en particulier en tant que femme » admet-elle. Birgit a été engagée en tant qu’experte associée au Secrétariat de la Conférence mondiale contre le racisme et la xénophobie à Durban, en Afrique du Sud (2001). Elle était chargée d’organiser la conférence parallèle pour les jeunes. La discrimination et le racisme sont restés des thèmes centraux pour elle, même si elle a quitté l’ONU pendant quatre ans pour travailler pour une ONG aux États-Unis. « Les gens pensent surtout à des conflits dans des pays lointains quand on parle des droits de l’homme. Mais il y a des violations des droits de l’homme partout, même dans les pays les plus développés «, souligne-t-elle. À l’occasion de la conférence de suivi de la Conférence mondiale contre le racisme et la xénophobie en 2009, elle est retournée au Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme. En raison de l’expérience qu’elle avait accumulée dans les domaines de la gestion financière, la gestion du personnel et la collecte de fonds, elle est devenue responsable de gestion de programme du département Afrique – soit près de la moitié des opérations et du budget de l’organisation.»

Campagne d’information, Timor oriental (1999)

Fascinée par les processus de gestion du changement, Birgit s’est consacrée ensuite à un projet de réforme institutionnelle pour renforcer les organes de traités de l’ONU (des quasi-tribunaux indépendants qui supervisent la mise en œuvre par les Etats des traités internationaux des droits de l’homme auxquels ils sont signataires). « Ce fut un projet politique très intéressant de l’Assemblée Générale à New York, où il fallait faire preuve de diplomatie et de créativité. » Mais le travail plus concret lui manquait. « L’impact des rapports et des résolutions demeure abstrait. »

« Le seul droit que nous n’avons pas est le droit à l’indifférence »

Le mandat actuel de Birgit au Bureau régional des droits de l’homme pour l’Europe est de protéger et de promouvoir les droits humains dans les 28 pays de l’UE. « L’intégration, la dé-ségrégation, l’égalité des sexes, et le respect des minorités sont au cœur de notre travail, qu’il s’agisse de personnes handicapées, des Rom, des migrants, d’enfants, des retraités ou des minorités sexuelles. » La mise en œuvre passe souvent par le monitoring et reporting. « L’année dernière, notre bureau a effectué des missions de vérification dans des centres d’accueil pour migrants en Grèce, en Italie et en Bulgarie ». Elle tente également d’influencer les décisions politiques : « Par exemple, si une directive anti-discrimination est présentée, nous travaillerons avec l’UE ». Birgit ne conseille pas seulement les gouvernements, mais aussi les défenseurs des droits de l’homme. « La semaine dernière, nous avions rendez-vous avec un groupe de militants des droits humains d’Hongrie. Ils traversent actuellement une période très difficile. Ils sont à la recherche de soutien, nous les conseillons et les mettons en contact avec les mécanismes internationaux des droits de l’homme. »

Presentation

Birgit s’inquiète pour l’état actuel des choses. « Une partie de moi sent instinctivement que le climat n’est plus aussi favorable aux droits de l’homme. De plus en plus souvent, ils sont remis en question. J’ai même l’impression que les droits des femmes stagnent, par exemple dans le domaine de la représentation politique. De plus, il existe une sorte de rupture de la solidarité. » Elle souligne que « l’Union européenne est avant tout une communauté de valeurs et qui, espérons-le, le restera. Si nous perdons ces valeurs, le projet européen sera vidé de sens. »

« Il faut faire évoluer l’ONU avec son temps. »

Nous devons également développer une vision holistique des droits de l’homme : « Beaucoup de gens associent les droits de l’homme avec la torture, la liberté d’expression, etcetera. Les droits de l’homme ne sont pas seulement des droits civiques ou des droits politiques, mais aussi économiques, sociaux et culturels. Si des jeunes ne trouvent pas de travail, il s’agit là d’un problème de droits humains. »

Au sujet des Nations Unies, Birgit regrette que l’organisation serve trop souvent de bouc émissaire pour l’absence d’accord entre les grandes puissances pour gérer les crises, comme par exemple en Syrie. « Un grand défi est de faire évoluer l’ONU avec son temps. Les lenteurs bureaucratiques sont également un problème », explique Birgit. « Nous devons pouvoir répondre plus rapidement en période de crise. Si nous souhaitons nous rendre à Calais avec une équipe, nous ne pouvons pas attendre trois mois avant que toutes les signatures soient posées et les fonds libérés. » Cependant, Birgit a beaucoup d’espoir dans le Secrétaire général Guterres pour la modernisation des Nations Unies. « Si quelqu’un peut y arriver, c’est bien lui, » dit-elle. Un autre défi pour Birgit reste la politisation des nominations de haut niveau : « Nous devons évoluer vers un système où les nominations aux Nations Unies sont transparentes, basées sur la compétence et non politiquement inspirées. »

« Le plus grand défi consiste à mobiliser les jeunes pour les droits de l’homme »

Dialogue avec les leaders religieux pour la prévention de la violence au Togo (2010)

Le plus grand défi pour Birgit est de mobiliser les jeunes en faveur des droits de l’homme. « Nous ne l’avons peut-être pas suffisamment fait par le passé. Trop de gens voient les droits de l’homme comme un acquis, quelque chose de normal. Ils ne comprennent pas à quel point les droits de l’homme sont précieux et quel rôle ils peuvent jouer en tant qu’individus. Nous espérons qu’avec l’aide des réseaux sociaux, les gens prendront conscience que les droits de l’homme n’existent pas seulement pour les minorités, mais pour tout le monde. Un système de valeurs que nous avons construit avec tant d’efforts peut être rapidement déconstruit. Par conséquent, pour moi, le seul droit que nous refusons d’avoir, c’est le droit à l’indifférence. »

Alors qu’elle essaye de réaliser des progrès au niveau des législations, politiques et programmes des Etats et de l’Union européenne, Birgit met l’accent sur notre responsabilité individuelle. « Au niveau personnel, nous avons également un rôle à jouer. Chacun de nous peut faire une différence. Vous ne devez pas spécialement travailler à l’ONU. Vous pouvez faire du volontariat ou marquer votre désaccord lorsque, dans votre cercle d’amis, vous entendez une remarque qui porte atteinte à la dignité de l’autre. »

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