Hervé Verhoosel

Hervé Verhoosel

Porte-parole du Sommet humanitaire mondial qui s’est déroulé les 23 et 24 mai derniers à Istanbul, Hervé Verhoosel a accepté de répondre à nos questions sur son parcours et ses projets professionnels. Attiré par les relations publiques, il s’est attelé très tôt à développer son réseau et ses compétences professionnelles, et a pris le risque de ne pas choisir la voie d’apprentissage classique.

 read on issuu

 ‘’ J’ai toujours été mauvais étudiant ‘’

Lorsqu’il était encore élève en dernière année secondaire, Hervé Verhoosel a créé sa propre entreprise, une société coopérative spécialisée dans les relations publiques, avec environ 120 euros de capital de départ. Son but était de prendre son indépendance en créant cette petite agence. Ce qui l’intéressait particulièrement, c’était de mettre les gens en relation, organiser des évènements et surtout constater le résultat de son travail et contribuer à faire bouger les choses. ‘’Au départ, ça m’amusait. J’ai commencé au niveau local, puis petit à petit j’ai eu plus de clients, j’ai fait de plus en plus de choses. J’ai beaucoup aimé travailler dans ce domaine, au grand damne de mes parents qui voulaient que je fasse une licence en droit ou en économie, qui étaient pour eux les deux seuls choix possibles. Mais j’ai toujours été mauvais étudiant.’’

Hervé a tout de même entamé un graduat en relations publiques, qu’il a arrêté après un an. ‘’J’étais convaincu que je savais déjà tout.’’ Ce n’est que bien plus tard, alors qu’il travaillait déjà pour l’ONU, qu’il a entrepris et complété un Master en communication des organisations à l’Université de Lyon II.  

‘’ Ce qui fait la différence, c’est l’expérience et le réseau professionnel ‘’

Quand il était en rhétorique, Hervé a effectué plusieurs stages lors desquels il dit avoir appris énormément et commencé à développer son carnet d’adresses. ‘’Je trouve que c’est le plus important et qu’il faut prendre ces stages sérieusement. Aujourd’hui, de plus en plus de gens ont des diplômes et, quelque part, il y a beaucoup de candidats pour tous les jobs. Donc, pour les employeurs, ce qui fait la différence c’est l’expérience et le réseau professionnel.’’ Selon lui, il est essentiel de pouvoir se démarquer des autres sur le marché du travail et de prouver qu’on peut faire bouger les choses plus vite qu’un autre. C’est pour ça que les stages sont une expérience inestimable.

Hervé a travaillé pendant presque 10 ans en tant que conseiller en communication pour plusieurs clients, dont l’International Crisis Group (ICG), une ONG engagée à prévenir et résoudre les conflits meurtriers. Son rôle y était limité puisqu’il s’occupait essentiellement de l’emploi du temps des membres du conseil d’administration qui étaient pour la plupart d’anciens chefs d’État ou ministres des affaires étrangères. Cela étant, il confie qu’il a appris énormément en observant et en côtoyant ces gens, notamment comment influencer des décideurs, et c’est ce qu’il fait aujourd’hui.

At WHS

Lui et sa famille ont ensuite déménagé de Londres à Genève, d’où il faisait du télétravail, toujours en tant qu’indépendant. Jusqu’à ce qu’un jour, l’OMS (Organisation mondiale de la santé) le contacte pour lui proposer de travailler sur la campagne Roll Back Malaria (RBM) pour la lutte contre le paludisme. Même si cela ne devait être qu’un mi-temps de deux mois, Hervé a surtout considéré cette proposition comme une opportunité de rencontrer de nouvelles personnes et sortir de la maison plus souvent. Cependant, ses recruteurs ont vite compris qu’Hervé pouvait faire beaucoup pour cette campagne ; ils lui ont donc donné plus de responsabilités et prolongé son contrat.

Roll Back Malaria est un partenariat qui fait partie de l’OMS, ainsi que de plusieurs autres agences de l’ONU comme le PNUD et UNICEF, et réunit également la Banque mondiale, des partenaires du secteur privé et des ONG. RMB coordonne la réponse et les actions contre la maladie au niveau global, et gère également les campagnes de sensibilisation. Ce partenariat a contribué à réduire de moitié le nombre de décès dus au paludisme en 15 ans, passant de 1 million de morts chaque année à un peu moins de 500 000 aujourd’hui.
 

Son travail pour RMB l’a amené à devenir le directeur du bureau de New York. En tant que patron de ce nouveau bureau, il a rencontré beaucoup de gens intéressants et complété son réseau de connaissances. Et principalement, il a monté plusieurs opérations et beaucoup voyagé. ‘’Je voyageais 65% de mon temps et j’ai adoré ça.’’ Les horaires pouvaient être ingrats mais la perspective d’aider à sauver des vies rendait les heures supplémentaires moins pénibles.

Ses voyages en Afrique l’ont particulièrement marqué, et surtout le constat dramatique de la réalité du terrain : ‘’Ils n’ont rien. Les médecins font le maximum avec ce qu’ils ont et ils gardent le sourire malgré tout.’’ C’est en allant dans le même hôpital en Tanzanie à trois ans d’intervalle qu’il a pu constater les progrès dans la lutte contre le paludisme, auxquels il a contribué avec beaucoup d’autres. ‘’Vous amenez une toute petite goutte dans l’océan qui a permis d’arriver à ce résultat. Ça vous rend heureux.’’

‘’ Il y a des moments dans la vie où l’on doit favoriser une certaine prise de risque.’’

Après huit ans passés à travailler pour Roll Back Malaria, il était temps pour Hervé de se diriger vers un nouveau projet. Ayant appris à connaître le Secrétaire général Ban Ki-moon grâce à des rencontres régulières autour du combat contre le paludisme, ce dernier a un jour confié qu’il allait organiser un sommet humanitaire. Le sommet avait besoin d’un porte-parole et c’est Hervé qui a été sélectionné pour le poste. ‘’C’est un job très différent du précédent, très centré sur les relations avec les médias. Vous êtes le visage que les gens mettent sur un évènement. C’est très excitant !’’

Le Sommet humanitaire mondial est différent car c’est une initiative le Secrétaire général, et non pas des pays-membres. Ban Ki-moon a lui-même vécu une situation de crise humanitaire quand il était enfant en Corée, et c’est la raison pour laquelle il comprend l’ampleur de cette nouvelle crise humanitaire globale : près de 125 millions de personnes sont actuellement dans le besoin d’une aide humanitaire. Ce chiffre n’a jamais été aussi élevé depuis la seconde guerre mondiale et il augmente chaque jour.

Ce sommet visait à rassembler tout le monde autour de la table et voulait donner l’occasion aux quelques 6000 participants de se rallier à un ou plusieurs des cinq piliers de l’agenda pour l’humanité, ou de venir présenter leurs engagements individuels. Il ne s’agissait pas uniquement d’une rencontre entre dirigeants, car étaient aussi présents des ONG et des représentants de communautés issues de pays à risque, qui ont pu ainsi directement expliquer leur situation et ce dont ils ont besoin.

 

Lorsqu’il a décidé de s’engager en tant que porte-parole du sommet, Hervé savait que ce serait seulement un job de trois mois. Il l’explique comme un choix professionnel car il considère qu’il peut encore se permettre prendre le risque de ne travailler que trois mois sur un projet qui l’intéresse énormément plutôt que de chercher directement une position à plus long terme. ‘’Il y a des moments dans la vie où l’on doit favoriser la découverte de quelque chose de nouveau et une certaine prise de risque’’, affirme-t-il.  

Au moment de l’interview, notre interlocuteur n’a encore aucune idée de ce vers quoi il va se diriger après le sommet. L’administration onusienne n’étant pas la plus rapide, ‘’cela peut prendre des mois [avant de trouver un nouveau poste].’’ Cependant, nous ne nous faisons aucun soucis pour lui, car au vu de son parcours atypique et ses nombreux contacts, il devrait vite être impliqué dans un nouveau projet.

With Ban Ki moon at WHS