Les femmes, premières victimes du harcèlement en ligne

L’inégalité des genres dans le monde réel est également présente dans le monde digital :  les femmes sont moins nombreuses à avoir accès à Internet, mais elles sont aussi les premières victimes du harcèlement et des discours de haine en ligne.

A l’occasion de la Journée internationale des femmes, UNRIC s’est entretenu avec la journaliste et réalisatrice belge Florence Hainaut qui a fait de la violence à l’égard des femmes son combat quotidien. En 2021, elle a coréalisé avec la journaliste belge Myriam Leroy un documentaire intitulé #SalePute qui met en lumière les violences que subissent les femmes via les réseaux sociaux.

 

Florence Hainaut

Violences et harcèlement

En 2015, l’ONU estimait que 73% des femmes dans le monde étaient exposées à de la violence sur Internet, notamment le harcèlement. En 2021, selon une étude de The Economist Intelligence Unit, ce chiffre serait passé à 85%, la pandémie de Covid-19 étant passée par là, la situation est sans doute pire aujourd’hui.

 

 

Florence Hainaut © Ingrid Otto

« Les femmes sont 20% moins susceptibles que les hommes d’utiliser l’Internet, mais 27 fois plus susceptibles d’être victimes de harcèlement ou
de discours de haine en ligne, lorsqu’elles le font ».
Csaba Kőrös, Président de l’Assemblée générale des Nations Unies.

Ces violences virtuelles ont des conséquences importantes sur le quotidien des femmes qui en sont les cibles, tant dans leur vie personnelle que professionnelle et peuvent avoir un fort impact sur leur santé mentale et physique.

« Nous sommes face à une volonté de faire taire les femmes », estime Florence Hainaut. La journaliste s’est rendu compte, à travers ses recherches et son expérience, que les femmes étaient particulièrement harcelées lorsqu’elles abordaient des sujets tels que les questions ayant trait à l’égalité et la politique, sortant ainsi de leur place attribuée par la société.

« Pour de nombreux hommes, il est encore aujourd’hui insupportable qu’une femme ait du pouvoir ou questionne celui qui est en place. »

Un problème « systémique »

Dans leur documentaire, Florence Hainaut et Myriam Leroy soulignent que la violence faite aux femmes est systémique. « Notre film n’est pas un film sur le cyberharcèlement, c’est un film sur la misogynie et Internet est le moyen de propager cette misogynie. On n’est pas harcelées sur Internet, on est harcelées via Internet ».

La violence à l’égard des femmes est un problème global. Dans tous les pays, « les femmes sont des cibles privilégiées de la violence en ligne et les hommes sont les principaux auteurs de ces violences. »

Pour Florence Hainaut, il n’y a pas de profil type d’harceleur, on en trouve même dans les catégories les plus aisées et les plus éduquées, bien intégrés dans la société. Le monde numérique est devenu un nouveau vecteur pour l’expression du sexisme.

Le rôle des médias à l’ère du numérique 

Florence Hainaut estime que les médias ont une part de responsabilité dans cette misogynie ambiante. Il est urgent que les médias emploient les mots justes concernant ces sujets et arrêtent de considérer les violences faites aux femmes comme des faits divers. Elle dénonce la manière dont certains médias vont choisir des invités pour leurs débats, notamment parmi les personnalités polémiques qui émergent sur internet, en particulier sur Twitter. « On sait que les algorithmes sont manipulés pour que le contenu le plus clivant soit mis en avant. »

Selon la journaliste, il y a un certain paradoxe sur le sort des femmes sur Internet. « D’une part, c’est un lieu de grande liberté. On y partage des savoirs peu accessibles dans les médias traditionnels, c’est aussi un lieu de galvanisation. Mais d’autre part, le climat de violence rend l’espace numérique dangereux pour elles. Internet est encore trop souvent considéré comme une espèce de monde parallèle, un espace comme flou et non réel, comme si la haine qui s’y propage n’avait pas d’effets tangibles. »

Quelles solutions contre les violences faites aux femmes sur Internet ? 

Selon Florence Hainaut, la réponse est avant tout politique. La lutte contre la violence et le harcèlement à l’égard des femmes via Internet doit être une « véritable priorité pour les gouvernements ».

Pour que cela soit possible, il est important de mettre en place des observatoires capables de fournir des chiffres fiables. Les termes employés pour parler de ces violences ont également un rôle important à jouer. Ainsi, il est nécessaire de s’accorder sur une définition commune pour pouvoir rendre politique ce phénomène. La journaliste pointe enfin le manque de définition officielle des violences en ligne, ce qui rend les études difficilement comparables entre elles et entretient le flou quant à la portée exacte du phénomène.

Retrouvez également une série de mini films du Mobile Film Festival sur la cause des femmes.

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