ActualitésGestion de l’eau : quand la pluie contraint des villes à innover

Gestion de l’eau : quand la pluie contraint des villes à innover

Les précipitations peuvent soumettre les systèmes de drainage des villes à une pression considérable, entraînant parfois des inondations ou des déversements d’eaux usées. Alors que le changement climatique devrait accroître la fréquence et l’intensité des phénomènes météorologiques extrêmes, il est essentiel de prendre des mesures ambitieuses.

Les villes développent des stratégies pour améliorer la qualité de l’eau et devenir plus résistantes aux changements climatiques. Lors d’une conférence organisée à Bruxelles le 6 mars 2023, des intervenants de la capitale belge, de Londres, de Copenhague et de Paris ont présenté leurs projets en matière de gestion des eaux pluviales urbaines.

Ces initiatives sont prises alors que les Nations Unies mettent l’accent sur la question de l’eau tout au long du mois de mars, avec la célébration de la Journée mondiale de l’eau le 22 mars et la Conférence des Nations Unies sur l’eau 2023 qui se tiendra du 22 au 24 mars.

Le super égout de Londres

Londres dépend d’un réseau d’égouts vieux de 150 ans, construit pour une population inférieure à la moitié de sa taille actuelle, près de neuf millions d’habitants. Le moindre épisode de pluie provoque le débordement des eaux usées non traitées, ce qui entraîne chaque année le déversement de millions de tonnes d’eaux usées brutes dans la Tamise. 

Pour assainir le fleuve, un « super égout » de 25 km de long est en cours de construction afin d’intercepter, de stocker et d’évacuer les eaux usées. Son tunnel principal sera aussi large que trois bus à deux niveaux et aura une profondeur comprise entre 30 et 66 mètres.

« C’est une solution qui permettra de réduire de plus de 95% les eaux usées les plus nocives qui se déversent dans la Tamise », explique Samantha Freelove, responsable développement durable à Thames Tideway Tunnel, la société chargée de la construction de l’égout, lors de la conférence de Bruxelles organisée par Canal It Up et BRAL, avec le soutien de Bruxelles Environnement.

Le projet londonien devrait coûter 4,9 milliards d’euros. Les engagements pris dans le cadre du projet sont liés aux Objectifs de développement durable, en particulier l’objectif 6 (eau propre et assainissement) et l’objectif 11 (villes et communautés durables).

Le projet a permis, par exemple, d’offrir des apprentissages et des formations aux jeunes, d’améliorer la biodiversité du fleuve et de créer sept zones de nouveau domaine public à Londres.

Le projet sera achevé en 2025 et Thames Tideway Tunnel affirme que le nouvel égout protégera la rivière au moins pendant les 100 prochaines années.

Prévention des inondations à Copenhague

En 2011, Copenhague a été inondée par un énorme « cloudburst », c’est-à-dire une quantité extrême de précipitations sur une courte période. En deux heures, 150 mm de pluie sont tombés, causant près d’un milliard d’euros de dégâts.

« Cela nous a vraiment montré à quel point une ville peut être vulnérable face au changement climatique, ce qui a réellement changé la donne », explique Lykke Leonardsen, directrice générale des Solutions pour une ville Résiliente et Durable de la ville de Copenhague. Pour protéger la ville contre les futures inondations, Copenhague a élaboré un plan de gestion des eaux pluviales urbaines d’un montant de 1,6 milliard d’euros comprenant 350 projets. La ville a estimé que l’extension de son réseau d’égouts existant serait coûteuse et perturbatrice, et a préféré transformer les infrastructures de surface existantes pour retenir ou transporter l’eau.

« Il faut penser intelligemment. Nous avons des parcs et des squares. Ils peuvent être utilisés pour le stockage de l’eau, comme des zones de rétention » , explique Lykke Leonardsen. Lorsqu’il ne pleut pas, ces zones créent de nouveaux espaces publics pour les citoyens et contribuent à améliorer la biodiversité.

Par exemple, dans le parc Enghave, un mur a été construit qui peut stocker jusqu’à 23 000 m3 d’eau pendant 24 heures. Par temps sec, le mur est un élément du parc. Dans d’autres quartiers de la ville, des jardins en contrebas servent également à stocker l’eau. Des tunnels sont utilisés dans les parties de la ville où il n’y a pas de possibilités de drainage au niveau du sol.

L’exécution des différents projets est en cours et devrait durer environ 20 à 30 ans.

Nager dans la Seine

La ville de Paris souhaite que la Seine soit accessible à la baignade d’ici 2024. Une promesse faite en 1988 par Jacques Chirac, alors maire de Paris, et reprise plusieurs fois depuis.

Aujourd’hui, deux millions de m³ d’eau polluée s’écoulent chaque année dans le fleuve en raison des déversements d’eaux usées. Bien qu’il s’agisse d’une réduction spectaculaire par rapport aux années 1980, quand 20 millions de m³ étaient déversés chaque année, la ville a mis au point un plan de 1,2 milliard d’euros pour réduire ce chiffre à zéro.

Ce plan prévoit notamment la construction d’un bassin pluvial sous le jardin Marie Curie, dans le sud-est de la ville, qui a la capacité de retenir l’équivalent de 20 piscines olympiques d’eau de pluie et d’éviter ainsi les rejets d’eau polluée. Les autorités locales s’efforcent également de résoudre les problèmes de mauvais raccordements chez les particuliers, qui font que les eaux usées finissent dans la rivière. Les bateaux amarrés dans la ville doivent également respecter certaines normes.

« Les Jeux olympiques et paralympiques de 2024 ont été un véritable catalyseur pour la ville », déclare Anita Ravlic, de la ville de Paris.

Plusieurs sports olympiques devraient être organisés dans le fleuve, et la ville souhaite rendre la Seine accessible à tous d’ici 2025, avec cinq zones de baignade prévues dans Paris.

La gestion de l’eau à Bruxelles

À Bruxelles, 10 millions de m³ d’eaux usées sont déversés chaque année dans la Senne et le canal de la ville.

« Le défi n’est pas seulement d’améliorer la qualité de l’eau, mais aussi de fournir un écosystème accueillant et résilient pour les organismes aquatiques », explique Michael Antoine de Bruxelles Environnement (Agence de l’environnement et de l’énergie de la Région de Bruxelles-Capitale).

Dans le cadre du projet de plan de gestion de l’eau de Bruxelles 2022-2027, les actions proposées comprennent l’élimination des entraves qui affectent la migration des poissons, la renaturation des berges et l’amélioration des performances des stations d’épuration des eaux usées. D’autres mesures comprennent la lutte contre les rejets directs d’eaux polluées et de déchets flottants, la réduction de l’impact des débordements pluviaux et l’amélioration des performances des stations d’épuration des eaux usées. Le plan fait actuellement l’objet d’une enquête publique.

Aucun calendrier précis n’a pour l’instant été fixé pour réduire les 10 millions de m³ d’eaux usées déversées. Alors que d’autres villes ont mis en place des plans à court terme pour résoudre ces problèmes, Bruxelles adopte une approche à plus long terme et progressive.

La Conférence de l’ONU sur l’eau

La conférence de l’ONU sur l’eau 2023 est une occasion unique pour le monde de s’unir autour de la problématique de l’eau.

Les gouvernements et les parties prenantes de tous les niveaux de la société se réuniront pour s’engager à agir. Cette conférence lancera le programme d’action pour l’eau, qui comprendra des engagements pris par des acteurs du monde entier.

Dans son message pour la Journée mondiale de l’eau de cette année, le Secrétaire général des Nations Unies, António Guterres, qualifie l’eau de « source de vie de notre monde » et rappelle nos rôles individuels et collectifs pour la protéger et l’utiliser de manière durable.

« Nous n’avons pas un instant à perdre. Faisons de 2023 une année de transformation et d’investissement pour l’élément vital de l’humanité ». 

Pour en savoir plus sur la conférence de l’ONU sur l’eau 2023, cliquez ici.

Le Partenariat français pour l’eau a développé un outil gratuit et ouvert à tous pour mesurer et évaluer l’impact des politiques publiques ou des projets liés à l’eau sur le développement durable. 

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